Tandis qu’à leurs œuvres perverses
Les hommes courent haletants,
Mars qui rit, malgré les averses,
Prépare en secret le printemps.
Pour les petites pâquerettes,
Sournoisement lorsque tout dort,
II repasse des collerettes
Et cisèle des boutons-d’or.
Dans le verger et dans la vigne,
II s’en va, furtif perruquier,
Avec une houppe de cygne,
Poudrer à frimas l’amandier.
La nature au lit se repose ;
Lui, descend au jardin désert
Et lace les boutons de rose
Dans leur corset de velours vert.
Tout en composant des solfèges
Qu’aux merles il siffle à mi-voix,
II sème aux prés les perce-neige
Et les violettes au bois.
Sur le cresson de la fontaine
Où le cerf boit, l’oreille au guet,
De sa main cachée il égrène
Les grelots d’argent du muguet.
Sous l’herbe, pour que tu la cueilles,
II met la fraise au teint vermeil,
Et te tresse un chapeau de feuilles
Pour te garantir du soleil.
Puis, lorsque sa besogne est faite,
Et que son règne va finir,
Au seuil d’avril tournant la tête,
II dit : « Printemps, tu peux venir ! »
Théophile Gautier (1811-1872)
Solange
20 mars 2024 à 11 h 38 min
Ce poème est mon préféré parmi ceux qui évoquent le printemps. Il me renvoie à un souvenir très précis de mon enfance et c’est celui que je proposais chaque année à mes élèves avec un autre que j’ai à ce jour totalement oublié. Mais celui-ci je crois que je suis capable de le réciter encore par coeur.
Je suis désolée pour la pub qui s’incruste en plein milieu du poème.
Solange
20 mars 2024 à 11 h 52 min
parmi mes souvenirs celui-ci encore : j’avais été inspectée un lundi matin, alors que je faisais étudier cette poésie. La séance durait presque une heure et ce moment était toujours propice à faire naître chez les enfants les émotions, les ressentis, les belles choses que seule la poésie peut faire s’exprimer librement. Lors de l’entretien qui a suivi l’inspecteur et moi avions discuté à bâtons rompus de la poésie et … de la maïeutique. C’est ce qu’il avait relevé dans ma façon de mener la séance de poésie. La maïeutique ! ou l’art d’accoucher les esprits. Les coeurs aussi. Lorsqu’il a quitté ma classe, il m’a salué, à ouvert la porte et dit : Printemps tu peux venir ! et il est parti tout guilleret. Je n’oublierai jamais cet inspecteur, atypique, avec son noeud pap vert et ses petites fleurs dessus. Voilà tout ce qui me revient ce matin.
Je souhaite à chacun et chacune un merveilleux printemps. Plein de fleurs et d’oiseaux.
ELISABETH LEROY
6 avril 2024 à 17 h 55 min
La nature est un refuge contre les tourments de la vie et du monde. Merci pour tes souvenirs en commentaire au-dessus. Il me semblait connaître ce poème, d’après les 1ers vers mais la suite me dit que non, je ne le connaissais pas. Merci pour la découverte. Bon week end et bises.
Solange
6 avril 2024 à 19 h 01 min
Merci Elisabeth pour ton passage et ton petit commentaire. Oui, la nature est un refuge comme tu le dis si bien. Je t’embrasse.